Les quais de la marina de Fort-de-France vivent, depuis vendredi soir, au rythme des arrivées de la Cap Martinique qui se succèdent de jour comme de nuit. Comme promis, c’est un accueil chaleureux qui est réservé sur l’île aux fleurs à tous les concurrents, marins solitaires et skippers en double, engagés sur cette toute première transat sans escale réservées aux amateurs. Convivialité et sportivité sont bien au rendez-vous au terme de leur échappée belle à travers l’Atlantique, dont chaque place du classement s’est disputée très cher depuis le départ le 1er mai de la Trinité-sur-Mer. Retour sur les 2 podiums en temps compensé de cette épreuve océanique sous jauge IRC, qui en permettant à des voiliers différents de courir ensemble, fait rimer diversité et équité sportive.

Alexandre Ozon cumule la victoire en temps réel et en temps compensé / Photo : Marc Marsillon

Trois solitaires en moins de 20 heures 

Chez les solitaires, Alexandre Ozon (Trophée Estuaire Rose), 43 ans,s’est offert les honneurs de la ligne d’arrivée, dans la soirée de vendredi sous les latitudes tropicales, à la barre de son Sun Fast 3300. Au terme d’une course magistrale qui a laissé peu de place à l’erreur, il s’adjuge la victoire en temps réel ainsi qu’en temps compensé. « J’ai pris la tête au niveau de Madère, les deux nuits qui ont suivi, j’ai vraiment été à fond. Devant, j’ai sans doute bénéficié d’alizés moins costauds. Mais je suis vraiment content d’avoir fait cette traversée sans escale, qui en solitaire ressemblait à une mini Route du Rhum, » confie une fois de retour sur terre le skipper de Royan, grand animateur de la course avec sa mascotte Lili aux couleurs de l’association qu’il a représentée tout au long du parcours. 

Jean-Pierre Kelbert prend la deuxième place avec seulement 1h30 de retard en temps compensé / Photo : Mario Gilbert

Sur le podium en compensé, le grand vainqueur de la Cap Martinique devance avec un petit écart d’une heure et demi, Jean-Pierre Kelbert (SNSM Morbihan), 58 ans, qui salue le sans-faute de son prédécesseur au terme de cette course d’une exigence de tous les instants. Au bout du compte, la satisfaction est là d’avoir bien mené sa barque, seul à bord de son JPK 10.30, entre les baies de la Trinité-sur-Mer et de Fort-de-France. « J’ai fait une ou deux petites boulettes. Le deuxième jour, j’ai mal géré le passage au Cap Finisterre. Je n’ai pas changé les voiles à temps et j’ai eu un peu de casse sur le bateau. J’ai perdu 25 milles et c'est ce qu’il me manque à la fin. Mais ce n’est pas un problème d’être battu par plus fort que soi. La navigation solitaire nous montre qu’on a des ressources en soi qu’on ne soupçonne pas ; et si cette traversée, ce n’était pas vraiment des vacances, elle m’a offert un vrai break pour la tête, » déclare à son arrivée au ponton le dirigeant du chantier JPK de Larmor-Plage qui construit un grand nombre de bateaux réunis sur cette course 100% amateurs.

Stéphane Bodin prend la troisième place après avoir mené jusqu'à Madère / Photo : Mario Gilbert

Arrivé un peu moins de 24 après les deux premiers, Stéphane Bodin (Gâteaux Solidaires), qui concède au final 19 heures et 44 minutes sur Alexandre Ozon, n’a jamais quitté non plus les avant-postes à la barre de son JPK 10.30. En tête sur la première semaine, le skipper de 53 ans, qui s’est entraîné à La Rochelle, a cédé le leadership après le passage de Madère, véritable juge de paix de cette traversée. « Je suis content d’arriver. J’ai eu le temps de digérer sur la dernière semaine de course le fait d’avoir été en en tête et de m’être fait eu par les petits copains. La course a été longue, il fallait faire preuve d’endurance, mais le plaisir a toujours été là, »explique celui qui a salué l’iconique rocher du Diamant, au soleil couchant, samedi. 

Ludovic Gérard et Nicolas Brossay s'imposent en temps compensé. / Photo : Mario Gilbert

Trois duos en moins de 8 heures 

Chez les doubles, le classement sous jauge IRC chamboule l’ordre des arrivées, puisque le premier sur la ligne, le binôme Delemazure/Weil (Project Rescue Ocean) engagé à bord d’un Figaro Bénéteau 2, termine, après les calculs en temps compensé, 8ème au classement général. La première place du podium revient de droit à la paire formée par les Marseillais Ludovic Gérard et Nicolas Brossay (Solenn for Pure Ocean). Deuxièmes en temps réel, les deux co-skippers ne boudent pas leur plaisir d’avoir réalisé leur rêve de signer cette victoire ensemble. « On a vécu une aventure exceptionnelle. 20 jours de mer, c'est énorme. On est parvenu à compenser un déficit de vitesse par des bons choix tactiques. On a fait de belles trajectoires tout du long de la course, avec des choix stratégiques importants à certains moments, » convient en cœur cette paire de copains qui a tiré profit de sa complicité évidente, garantissant un fou rire par jour dans le cockpit de son JPK 10.80. 

Tristan de Witte et Marcel Dutreux prennent la seconde place grâce à une belle option Sud.
/ Photo : Marc Marsillon

Il en est de même du duo Tristan de Witte/Marcel Dutreux qui signe une belle performance. 8ème en temps réel, les deux compères du petit JPK 10.10, qui soutenaient les associations Entreprise du Patrimoine Vivant et Enfants du Mékong, n’ont jamais rien cédé pour se hisser sur la deuxième place du podium. « On a vécu une belle aventure à deux. C’était une grande première pour nous, et on a fait notre apprentissage sur beaucoup de choses. Qu’on termine ici en Martinique avec des plus grands bateaux, cela prouve que notre option Sud était la bonne, » conviennent-ils. 

Olivier Burgaud et Sylvain Pontu complètent le podium. / Photo : Mario Gilbert

Enfin, difficile aussi de ne pas saluer la course du binôme Olivier Burgaud/Sylvain Pontu (Contre Vents et Cancers pour Gustave Roussy), qui termine 3ème, après avoir bataillé pour se recaler et refaire une partie de son retard cumulé sur une route Nord. « Il n’y pas eu un jour mauvais, pourtant on a cassé du matériel au cap Finisterre, dont l’aérien. On a manqué de beaucoup de repères, »détaille le premier qui regrette aussi qu’ils n’aient pas eu le temps de mieux prendre en main leur nouveau Sun Fast 3300. « Le cap Finisterre et ses galères a été un moment difficile, mais ce n’est rien par rapport à tous les moments de plaisir vécus en mer. On a énormément gagné en expérience, on s’est rempli de plein de choses, » ajoute le second. 

À l’heure où nous écrivons ces lignes, 9 skippers solitaires et 18 équipages doubles en ont désormais fini avec cette grande traversée sans escale. 7 bateaux sont encore en mer et le prochain équipage attendu est celui de Pierre Barsotti et Etienne Bouthors. Il leur reste entre 40 et 200 milles à parcourir pour rallier Fort-de-France. Tous sont attendus avant la remise des prix qui aura lieu le week-end prochain, clôturant cette Cap Martinique que tous qualifient de très engagée. Sur l’eau, comme à travers toutes les associations dont ces marins ont porté haut les couleurs à travers l’Atlantique… 

(*)Rappel : 
La Cap-Martinique se déroule selon la jauge IRC qui permet de faire courir ensemble des bateaux de caractéristiques différentes. Les bateaux ne sont pas classés en temps réel mais en temps compensé. Avant le départ, les bateaux ont été évalués un par un et chacun s’est vu attribuer un indice selon certains critères (taille, poids, voile...) qui va offrir un bonus ou au contraire un handicap. On calcule ensuite le temps compensé en prenant le temps réel pondéré par ce fameux indice. Cela donne donc parfois des résultats très différents de ce qu'on voit sur l'eau. Le concurrent qui franchi la ligne en premier n'est donc pas forcément le vainqueur de la course.

Over to the champions

The docks of the Fort-de-France marina have been pulsating day and night to the beat of a succession of Cap Martinique finishers. As promised, a warm welcome has been reserved on the Island of Flowers for each and every competitor, solo sailors and double-handed crews alike, competing in this the very first non-stop transatlantic race reserved for amateurs. Conviviality and sportsmanship have reigned supreme at the end of this Atlantic sprint, where every place on the leader board has been fought for tooth and nail since the race set sail from La Trinité-sur-Mer in south-west Brittany on 1 May. We review the 2 podiums in corrected time for this offshore IRC event, which enables different sailboats to race together in a joyous blend of diversity and sporting equity.

Alexandre Ozon secures victory in elapsed and corrected time / Photo: Marc Marsillon

Three solo sailors finish within 20 hours of one another 

Among the solo sailors, Alexandre Ozon (Trophée Estuaire Rose), 43 years of age, treated himself to line honours in the tropical latitudes of Martinique on Friday evening, at the helm of his Sun Fast 3300. After sailing a masterful race, which left little room for error, he secured victory in elapsed as well as corrected time. “I snatched the lead around Madeira and I was really flat out for the next two nights. Before that, I doubtless benefited from less meaty trade wind, but I’m really happy to have completed this crossing without stopovers, which in solo format is akin to a mini-Route du Rhum,” admitted the skipper from Royan on making landfall, having led the way for much of the race with his mascot Lili in the colours of the association he has represented with such panache throughout the course. 

Jean-Pierre Kelbert bags second place, just 1hr30 behind in corrected time / Photo: Mario Gilbert

Scooping all the awards in the race for the podium in the Cap Martinique, Ozon ultimately finished just 90 minutes ahead of Jean-Pierre Kelbert (SNSM Morbihan), 58, who salutes the flawless performance of the victor after what proved to be a demanding race from start to finish. This second place comes with the satisfaction of having sailed a superb race aboard his JPK 10.30, between the bays of La Trinité-sur-Mer and Fort-de-France. “I made one or two minor blunders. On the second day out, I didn’t handle the passage around Cape Finisterre very well. I didn’t switch sails in time and suffered a bit of damage on the boat. I lost 25 miles of ground and that’s what I was missing at the finish. That said, it’s not a problem to have been beaten by someone who’s better than you are. Solo sailing shows us that we have the ability to dig deeper than we ever imagined. Although this passage really wasn’t a holiday, it definitely cleared my head,” he admitted upon his arrival dockside. Some welcome time-out then for this manager of the JPK yard in Larmor-Plage, which has built a large proportion of the boats that have come together in this 100% amateur race.

Stéphane Bodin takes third place having led the fleet to Madeira / Photo: Mario Gilbert

Making the finish line just under 24 hours after the top two boats, Stéphane Bodin (Gâteaux Solidaires), who was just 19 hours and 44 minutes astern of Alexandre Ozon in corrected time, never dropped out of contention at the front of the fleet on his JPK 10.30. Leading the sprint for the first week, the 53-year-old skipper, who trained in La Rochelle, relinquished his grip on pole position after negotiating Madeira, a genuine Justice of the Peace in this transatlantic crossing. “I’m happy to have made the finish. Over the last week of racing, I’ve had the time to digest the fact that I let my lead slide after being outmanoeuvred by my little playmates. It was a long race and it really took stamina, but it was enjoyable throughout,” enthuses the sailor, who rounded the iconic Diamond Rock at sunset on Saturday.

The Ludovic Gérard and Nicolas Brossay pairing takes the win in corrected time. / Photo: Mario Gilbert

Three duos in the space of 8 hours 

In the double-handed category, the IRC ranking has turned the ranking in elapsed time on its head. Indeed, first to cross the finish line, the duo of Delemazure/Weil (Project Rescue Ocean) competing on a Figaro Bénéteau 2, have finished in 8th place overall in corrected time. As such, the top spot on the podium rightfully belongs to the duo from Marseille, Ludovic Gérard and Nicolas Brossay (Solenn for Pure Ocean). Second in elapsed time, the two co-skippers make no secret of their pleasure at realising their dream of securing this victory together. “We’ve had an amazing adventure. 20 days at sea is massive. We managed to make up for our speed deficit thanks to some sound tactical choices. We sailed some great trajectories throughout the race, with some key strategic options at times,” agreed the friends, who managed to reap the rewards of their obvious bond, which guaranteed them a chuckle a day in the cockpit of their JPK 10.80. 

Tristan de Witte and Marcel Dutreux snatch second place thanks to a stellar southerly option.
/ Photo: Marc Marsillon

It’s a similar scenario for the duo made up of Tristan de Witte/Marcel Dutreux who also performed fantastically well. 8th in elapsed time, the two friends on the little JPK 10.10, who were supporting the Entreprise du Patrimoine Vivant and Enfants du Mékong associations, kept pedal to the metal throughout to secure a well-deserved second place on the podium in corrected time. “The two of us have had a wonderful adventure. It was a major first for us and it was a steep learning curve in so many ways. To be able to make landfall in Martinique with the larger boats proves that our southerly option was the right one,” they explain. 

Olivier Burgaud and Sylvain Pontu complete the podium. / Photo: Mario Gilbert

Finally, it would be hard not to pay tribute to the race posted by the pairing of Olivier Burgaud/Sylvain Pontu (Contre Vents et Cancers pour Gustave Roussy), who finished 3rd after a hard slog to reposition themselves on the racetrack and make up some of their deficit amassed during their northerly option. “There wasn’t a single bad day, even though we broke some equipment at Cape Finisterre, including the mast wand. Our points of reference on the boat were seriously lacking,” explains the former, who also laments the fact that they didn’t have more time to familiarise themselves with their new Sun Fast 3300. “Cape Finisterre and its hardships were tough-going, but it was nothing compared to all the enjoyable moments we had at sea. We’ve made giant leaps in our understanding of the boat and we’ve fulfilled our goals in so many ways,” adds the second. 

As we go to press, 9 solo skippers and 18 double-handed crews have now completed this epic transatlantic passage without stopovers. 7 boats are still at sea and the next crew expected in is that of Pierre Barsotti and Etienne Bouthors. They have between 25 and 400 miles to go to make Fort-de-France. All of them are expected across the finish line before the prize-giving this weekend, rounding off a Cap Martinique that, by all accounts, has been hard-fought. Indeed, the sailors have pulled out all the stops to excel on the racetrack and to fly the flag of various associations across the Atlantic… 

(*)Reminder: 
The Cap-Martinique is run according to the IRC rule, which enables boats of different sizes and designs to race on a single playing field. The boats are ranked in corrected time rather than elapsed time. Before the start, the boats are assessed one by one and each is awarded a rating according to certain criteria (size, weight, sails…), which will provide them with either a bonus or handicap. We then calculate the corrected time by taking the elapsed time weighted by this famous rating. This sometimes gives very different results, as you can see out on the water. The competitor who gets line honours is not necessarily the winner of the race.